L’essor fulgurant de l’intelligence artificielle (IA) bouleverse notre quotidien, tant sur le plan professionnel que personnel. Capable d’automatiser des tâches complexes, de réduire les temps de traitement et de rendre certaines compétences accessibles à un plus grand nombre, l’IA fascine par sa puissance. Mais cette performance a un revers souvent ignoré : son impact environnemental. En particulier, la consommation énergétique nécessaire au fonctionnement des IA suscite des inquiétudes croissantes, notamment concernant le rôle des centres de données dans le réchauffement climatique.
Une consommation énergétique qui explose
Selon un rapport récent de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la consommation électrique mondiale des centres de données atteignait déjà 415 térawattheures (TWh) en 2023, soit 1,5 % de la consommation électrique globale. Ce chiffre est presque équivalent à la consommation annuelle de la France en 2024, estimée à 440 TWh. Et les projections sont alarmantes : d’ici 2030, cette consommation pourrait plus que doubler pour atteindre 945 TWh, ce qui correspond à la consommation annuelle du Japon, un pays de plus de 120 millions d’habitants.
Cette envolée est principalement attribuée à l’essor de l’IA. Les data centers, pour faire fonctionner en continu des serveurs toujours plus puissants et gourmands, ont recours à des systèmes de refroidissement complexes et énergivores, aggravant encore leur empreinte environnementale.
Des émissions de CO₂ en forte augmentation
Cette hausse de la demande électrique s’accompagne inévitablement d’une augmentation des émissions de dioxyde de carbone (CO₂). Actuellement, les centres de données rejettent environ 180 millions de tonnes de CO₂ par an. Ce chiffre pourrait atteindre 300 millions de tonnes d’ici 2035, toujours selon l’AIE. Si cette part peut sembler modeste comparée aux 41,6 milliards de tonnes de CO₂ émises chaque année par le secteur de l’énergie à l’échelle mondiale, elle n’en demeure pas moins préoccupante : les data centers figurent parmi les sources d’émissions qui croissent le plus rapidement.
Une pression accrue sur les réseaux électriques
Au-delà de la question climatique, l’augmentation exponentielle de la consommation des data centers pose un réel défi en matière d’approvisionnement énergétique. Les villes accueillant ces infrastructures, souvent qualifiées de « hubs technologiques », devront adapter et renforcer leurs réseaux de distribution électrique pour faire face à cette nouvelle demande. D’après l’AIE, les États-Unis, l’Europe et la Chine concentreront à elles seules 85 % de la consommation mondiale des centres de données, devenant ainsi des points névralgiques du défi énergétique mondial.
L’IA au service de la transition énergétique ?
Cependant, l’intelligence artificielle n’est pas uniquement un facteur aggravant. Elle peut aussi jouer un rôle de levier dans la lutte contre le changement climatique. L’AIE souligne en effet les opportunités qu’offre l’IA pour le secteur énergétique. Grâce à ses capacités d’analyse et de prédiction, l’IA pourrait optimiser la gestion des réseaux électriques, améliorer la production, la distribution et la consommation d’énergie, réduire les pertes, et diminuer les coûts d’exploitation.
Mieux encore, l’IA peut accélérer l’intégration des énergies bas-carbone dans les systèmes existants, en favorisant des innovations qui permettront de rendre les infrastructures plus efficaces et résilientes. Ces progrès pourraient contrebalancer partiellement les impacts négatifs liés à la hausse de la demande énergétique des data centers.
Une efficacité énergétique en constante amélioration
Enfin, il convient de rappeler que l’efficacité énergétique de l’intelligence artificielle évolue avec chaque génération de modèles. Les dernières avancées technologiques laissent espérer une meilleure efficacité par watt consommé, ce qui pourrait limiter l’augmentation globale de la demande énergétique. L’équation reste complexe, mais l’évolution des technologies pourrait bien en atténuer les effets les plus néfastes.
Conclusion : un équilibre à trouver
L’intelligence artificielle est à la fois un accélérateur d’émissions et un outil de maîtrise énergétique. Le défi est désormais de taille : comment faire cohabiter cette innovation technologique majeure avec les impératifs de durabilité ? Comme le souligne l’AIE, « l’intelligence artificielle pourrait transformer le secteur de l’énergie au cours de la prochaine décennie », en provoquant une explosion de la demande, certes, mais aussi en offrant des leviers considérables pour réduire les coûts, améliorer la compétitivité et atténuer les émissions de gaz à effet de serre.